Joachim Lafosse
du 19/01/2007 au 28/01/2007
Fondation GAN pour le cinéma,
Paris
Le Forum des Images étant toujours fermé, c’est à la Fondation GAN pour le Cinéma, partenaire de longue date des Premiers Plans, que la traditionnelle reprise parisienne du palmarès angevin eut lieu. Là où deux longs-métrages et plusieurs courts étaient présentés les années précédentes, la voilure fut réduite à un long et un court cette année : les récipiendaires des Grands Prix du Jury dans les sélections respectives.
Lauréat de la compétition des premiers courts-métrages européens, Contracuerpo est l’œuvre de l’Espagnol Eduardo Chapero-Jackson, cinéaste ami d’Alejandro Amenabar. S’attachant à une jeune femme obsédée par son image et s’emprisonnant dans un mannequin d’exposition, le film va alterner séquences flashes-backs relatant les événements l’ayant conduit là et scènes du présent où est dépeinte l’évolution du mannequin. Trouvant une résonance toute particulière dans ces temps où la maigreur des top-models est remise en cause, Contracuerpo interpelle par la violence d’un propos servi par une réalisation ascétique (absence de dialogues, bande-son minimale, caméra fixe). Ne proposant pas d’explication à l’anorexie de la jeune femme, obligée de se faire hospitaliser, Eduardo Chapero-Jackson a ainsi le mérite de laisser de côté les motifs traditionnellement avancés (poids de la famille, pression sociétale) pour se centrer uniquement sur sa figure principale.
Au sein d’une compétition de premiers longs-métrages européens dans laquelle on retrouvait Sehnsucht de Valeska Grisebach (vu et apprécié aux Rencontres 2006), c’est Ca Rend Heureux de Joachim Lafosse qui fut distingué. Réalisateur belge qu’on avait découvert à Locarno en 2004 à l’occasion de la projection en compétition, du très bon Folie Privée, Lafosse présentait à Angers son premier long-métrage (le précédent se voyant qualifié de moyen-métrage) alors que son second, Nue Propriété (avec Isabelle Huppert et Jérémie Rénier), annoncé sur les écrans français pour la fin février, avait été particulièrement remarqué à la dernière Mostra de Venise. Précisément, Ca Rend Heureux revient sur la sortie de Folie Privée : marqué par l’échec commercial du film, un jeune réalisateur décide alors de tourner un film s’inspirant de sa situation présente. S’en résulte alors un enchevêtrement du réel et de la fiction qui conduit à quelques scènes hilarantes comme celle où Fabrizio cherche à recruter, dans la file même de l’ANPE locale, des figurants pour jouer des chômeurs en train de pointer ou lorsqu’il organise une table ronde à l’occasion de laquelle l’équipe du film va démolir le scénario qu’il leur avait transmis. Dédoublant donc la classique mise en abyme (il ne s’agit pas seulement d’un film sur le cinéma, mais d’un film sur un film parlant d’un réalisateur en train de faire un film), Joachim Lafosse parvient à traiter, avec une jubilation, une fraîcheur et une autodérision peu communes, les affres de la création. N’épargnant pas son personnage principal tout en ménageant certains passages plus tendres, cette « auto-fiction » témoigne donc une nouvelle fois des qualités de son auteur, talent aux multiples facettes.
Date de sortie :
Ca Rend Heureux : 20 juin 2007
le 30/01/2007