(Ad Noiseam / Nuit & Brouillard)
12/01/2004
Electronique
On avait déjà chroniqué le précédent album de Cordell Klier, Apparitions que l’on avait trouvé intéressant mais qui sur la longueur perdait de sa force. Mais une réécoute récente nous montre qu’il tient finalement bien la route. C’était en tout cas un disque qui ne laissait pas indifférent, révélant un musicien à la forte personnalité, et on était logiquement curieux de voir ce qu’il nous proposait aujourd’hui.
On n’est pas vraiment perdu puisque l’on retrouve tout de suite ce mélange plutôt osé de sombres nappes ambient et d’influences de l’école clicks & cuts de Mille Plateaux (on trouve notamment Cordell Klier sur la compilation Klangmaschine_Soundmachine parue chez Ritornell aux côtés d’Alva Noto, SND et Frank Bretschneider). On est tout d’abord séduit par la forme, la douceur de ces souffles, drones, nappes et la finesse de ces petits bruitages, micro samples provenant aussi bien d’un laptop que de sonorités concrètes (objet qui glisse sur le sol, coups donnés sur un objet) affublées d’une reverb permettant d’accentuer l’aspect habité, fantomatique de sa musique. Et puis au fil des morceaux, on se lasse, on reste complètement en dehors de cette musique qui, à ce stade, n’est pas froide mais clinique.
Les sonorités qui tapissent chaque morceaux forment un joli cliché de musiques dark-ambient, post-industrielle, et ne parviennent pas à nous faire frémir. Chaque titre est à peu près construit de la même façon : nappes et textures ambient, saupoudrage de clicks et autres bruits concrets construisant ensemble une rythmique plus ou moins réussie qui se répète à l’infini, allant de 3 à 9 minutes, avec même un break factice sur le 6eme titre. Le parti pris d’appeler un tel album Winter fera finalement sourire, tout comme le fait de ne donner aucun titre aux 10 pistes qui composent l’album.
Alors quoi ?... C’est nul ??? Et bien non, et c’est bien là toute notre difficulté pour porter un avis sur ce disque. Le mélange est original, et il pourrait même faire basculer des amateurs de musiques dark-ambient vers du clicks & cuts à la Mille Plateaux, c’est très fin, soigné, et parfois les éléments mis en place fonctionnent parfaitement entre eux, comme la rythmique de la piste 5, peut-être un peu plus riche et complexe que la moyenne de l’album.
Mais on sera bien content de voir poindre la fin de l’hiver (piste 10) avec ses petits artefacts numériques qui semblent imiter le réveil d’animaux en fin d’hibernation, et ses chuintements qui colleraient à merveille sur un gros plan d’une plante sortant de terre dans un film de Michel Gondry. Ici l’orchestration est plus équilibrée, plus riche aussi, et on se dit alors que le disque aurait pu être réussi.
le 14/03/2004