((Re)Aktion Records / Acropole Records)
10/17/2004
Electronique
Naing Naing est le projet solo de François L’Homer, délaissant le temps d’un album le punk hardcore de ses projets Heimatlos et Tear of a Doll pour produire ici une musique hors norme, prenant son origine dans la musique concrète, utilisant toutes les possibilités offertes par la technologie d’édition et de traitement numérique, sans jamais oublier la notion de plaisir.
En 13 morceaux, Naing Naing fait danser les brosses à dents, chanter les grenouilles, les abeilles ou les criquets, et transforme un groupe électrogène en batterie. Après une courte intro qui ressemble beaucoup à un classique morceau de musique concrète, François L’Homer s’amuse avec ses Brosse à Danse. On vous conseille d’ailleurs la lecture des notes de pochettes, fort instructives, pleines d’humour, de private jokes, replaçant chaque titre dans son contexte. On ne peut s’empêcher de penser à Matmos, mais avec l’humour en plus. Les premiers titres sont assez riches avec la participation d’une chanteuse lisant les notes sur un emballage de dentifrice, des gargarismes, un ballon de baudruche se dégonflant en sifflant, ou encore la chanteuse de Tear of a Doll qui chante et produit de superbes vocalises au milieu d’une chorale de grenouilles sur Webbed.
Mais notre plus grosse surprise reste à venir avec Dervish Bee, où n’apparaissent que des bruits d’abeilles, mouches et guêpes. Tout y est, la rythmique efficace, la mélodie accrocheuse à forte coloration orientale, on tient là un tube improbable. Suivant le même principe, ce Français actuellement expatrié en Asie s’essaye au tabla-guêpe de façon tout aussi étonnante.
Efficace également mais moins étonnant, Mi ma la bu est un morceau principalement rythmique construit à partir de bruits de groupe électrogène. Énergique, parfois noisy, ponctué de quelques breaks et break beats, il fait son effet mais se prolonge peut-être un peu trop.
Retour à la nature avec Wazo et ses 10 minutes de chants d’oiseaux. Le traitement est ici plus subtil, le chant naturel d’oiseaux captés aux quatre coins du monde semblant souvent naturel. Du coup cette longue pièce reste mélodiquement assez abstraite, mais sa rythmique tribale nous sert de fil rouge. On suivra également les notes de pochette qui découpent ce morceau en huit mouvements aux noms évocateurs de Jazzy thrush, Crows attack (heavy metal part), ou Lyrebird blues (more fake guitar solos), nous amenant effectivement à faire le parallèle entre ces sonorités naturelles et des styles musicaux ou des instruments plus conventionnels.
Pour finir, deux morceaux construits à partir de samples de glaçons dans un verre, utilisant à la fois les bruits classiques de la glace qui tombe dans l’eau, qui tinte contre le verre, mais aussi les micro-craquements et souffles produits par le choc thermique, et une reprise de la Sarabande de Heandel, par une chorale de criquets.
_ Toothbrush Fever est une excellente réussite, qui donne à écouter les bruits de notre environnement d’une autre manière, à insuffler humour et poésie là où l’on n’en voit pas forcément. Naing Naing s’est fait plaisir, mais nous donne aussi beaucoup de plaisir à l’écoute de son album.
le 26/02/2005