(56 Stuff / Electrosputnik.com)
04/07/2005
Electronique
Encore une compilation d’un label russe me direz-vous. Certes... mais celle-ci sort un peu du lot au niveau du style musical, et revendique ouvertement sa différence dès la lecture du titre. Le sous-titre dévoile un peu le sujet. "downtempo and lounge compilation" nous fait a priori un peu peur, mais comme Warp il y a une quinzaine d’année inventait l’intelligent techno, 56 Stuff tente de faire passer la pilule vendant cette compilation de musiques douces et chaleureuses comme une alternative intéressante aux Hotel Costes et autres Buddha Bar. Qu’en est-il au juste ?
Pour ce deuxième volume, le label passe au CD pressé alors que ses précédentes sorties (une vingtaine) étaient au format CD-R. 16 artistes se partagent l’affiche, et apparemment jamais le nom de l’un d’entre eux n’est parvenu à nos oreilles. Beaucoup de petits jeunes qui débutent, la plupart étant basé à St Petersbourg, les autres ayant généralement sorti des album chez 56 Stuff (au format CD-R donc) ou encore sur des net labels.
En fait on est assez partagé. Il est vrai qu’il y a quelques productions réellement intéressantes, de très grosses surprises à commencer par Yadi avec ses cuivres, ses cris, ses percussions, qui nous donne l’impression d’être en plein carnaval de Rio. Sans aller jusque là, il y a bien un tiers des artistes qui s’orientent vers le jazz avec plus ou moins de réussite. On passera vite sur le jazz-funk de Mnemonic, et le VIP Cola de YaD répond parfaitement à l’appellation jazz-lounge. Il semble d’ailleurs utiliser un theremin pour produire une mélodie sifflante et continue qui vient ajouter au côté rétro. D’ailleurs quand il n’y a pas quelques cuivres chaleureux, theremin ou orgues sont de la partie et apportent une douceur réconfortante sur un sympathique (Zimmer G) ou magnifique et subtile (Dima Vihornov) rétro-jazz 70s.
On ne sait par contre que penser de Jazzy Puzzles. On aura d’abord envie de zapper leur Naked Melody ennuyant au possible dans sa première moitié, mais voilà qu’il part ensuite dans un jazz breakcore acoustique impressionnant, batterie et contrebasse complètement syncopé.
Le reste de l’album intègre encore parfois des cuivres, des rythmiques jazzy, mais la présence d’outils électroniques est globalement plus visible. Avec son nom, il semblait évident que 8bit serait dans cette catégorie. Son Haywadana n’est pas hyper excitant, mais assez efficace, ses cassures lui donne un petit côté chaotique, son break ambient est inattendu, et sa voix féminine lui confère un charme particulier. Few débute de manière très jazz et remplace petit à petit ses sonorités acoustiques par des éléments électro dans un style assez haché, Shtukk est l’un des artistes qui nous touche le plus avec un minimalisme fort attrayant, Moonscape s’en sort également pas mal avec ses grooves expérimentaux et futuristes, tandis que Cemtex relève le tempo et tente un mélange explosif de contrebasse et basse électronique.
Mombus est peut-être celui qui peut le plus prétendre au statut de "star" de cette compilation. Déjà présent sur des labels comme Cheburec ou Fulldozer, il nous offre le plus beau morceau de l’album, très électronique mais avec une superbe mélodie de métallophone, quelques voix éthérées discrètes, et des sonorités plutôt travaillées. COPY fait également son effet, et nous rappelle l’excellente drum’n bass aérienne de LTJ Bukem.
On se sent enfin un peu obligé de citer Yellowhead et Randomajestiq. Le premier à déjà sorti quatre albums chez 56 Stuff, et produit ici un électro-jazz ludique à base d’orgues et bleeps. Le second est aussi très productif avec quatre albums sur divers labels et d’autres sorties MP3. Il est malheureusement accompagné ici par une chanteuse espagnole qui gâche tout.
Si l’ensemble s’avère plutôt agréable et effectivement pas du tout soporifique, on ne pense pas que cette compilation parvienne à lancer un genre intelligent-lounge. On est partagé entre des passages trop lounge pour être intéressant et d’autres trop intéressants/complexes pour fonctionner dans les milieux lounge.
le 19/09/2005