Vorpal

Déjà la quatrième sortie pour Cock Rock Disco, le label de Jason Forrest, spécialisé en breakcore et autres rythmiques fracassées. Pour simplifier, disons que tout ce qui est trop extrême pour n’importe quel label peut se retrouver ici. Cela dit on peut s’étonner de trouver cet album de Vorpal chez Cock Rock Disco puisqu’il s’agit certainement du disque le plus facile à appréhender de la série.

En fait on n’a pas vraiment envie de ranger Vorpal sous l’étiquette "breakcore". Si l’on en trouve quelques traces, dans les rythmiques bien entendu, Andy Kozloski apporte ici un véritable travail de composition musicale (au sens classique du terme), et construit de subtiles mélodies alors que l’on est plus habitué au collage de samples et au flirt avec la scène "bootleg". Du coup Vorpal est a rapprocher d’artistes comme Venetian Snares et Squarepusher plutôt que de Shitmat (chez Planet Mu) et Duran Duran Duran (également chez Cock Rock Disco). Le premier titre (Track #13) en est un excellent exemple : rythmique déglinguée de rigueur (imaginez le tempo d’un morceau breakcore mais dont les percussions sont jouées dans n’importe quel ordre), fractures, effets de syncope, puis magnifiques sonorités mélodiques lumineuses qui nous font pencher vers une electronica fine et soyeuse. On comparerait alors ce titre à ce qu’a pu faire Venetian Snares sur son magnifique Huge Chrome Cylinder Box Unfolding.

On retrouve bien sûr ce style sur plusieurs titres, dont Gymnopédie v.1.01 (une reprise d’Erik Satie avec solo de piano mis en rythme et November-014 qui contient quant à lui des samples du Concerto Brandebourgeois N°2 de J.S. Bach, You Treacherous Girl plus carré avec une mélodie en phase avec les éléments rythmiques, Pinot Noir Film plus sombre et jazzy mais dont les petites mélodies efficaces nous rappellent Aphex Twin période Girl/Boy EP. Enfin on notera Irrevocable, parce qu’un titre arythmique sur une album limite breakcore ne peut passer inaperçu.
Le reste de l’album est construit sur cette même base, mais l’aspect fracturé, déconstruit, prend le dessus. On retrouve toujours des bribes mélodiques, des sonorités acoustiques (piano et flûte sur Hip Hop Wabisabi), des rythmiques sautillantes, mais cette volonté de toujours tout casser a tendance à annihiler le plaisir que l’on pourrait avoir, d’où une certaine frustration qui peut se dégager à l’écoute de certains titres. Pourtant il y a toujours de bonnes idées, comme l’aspect particulièrement aéré de Crash Up Against the Inevitable alors que la densité des rythmes pourrait devenir étouffante.

Ce guide incomplet de la musique de Vorpal reste une très bonne surprise et notre album préféré de Cock Rock Disco à ce jour.

Fabrice ALLARD
le 24/11/2005