(U-Cover / Import)
00/03/2004
Electronique

Après le dansant et extatique Dreim (Kracfive Records, 2001) et les très réussis albums electronica Cenny Crush (DUB, 2002) et Smiling little cow (Neo Ouija, 2002), et alors qu’un nouvel album (Through friendly waters) vient de sortir sur le label néerlandais Sending Orbs, le prolifique Reimer Eising nous a offert ce que nous considérons être le meilleur album de 2004 sur l’excellent label U-Cover.
Il explore avec ce disque une nouvelle facette de son grand talent en déployant, tout au long des 14 plages qui le composent, une ambient qui instaure imperceptiblement un climat onirique, fantasmatique, puissamment évocateur chez l’auditeur. Qu’on le veuille ou non, on ne peut rester insensible à ce Volleyed Iron : l’oreille sera immanquablement accrochée par ces structures mi-apaisantes et languides, mi-inquiétantes et frissonnantes. Nappes denses et profondes, multiplicité de sons et d’effets jamais gratuits, beauté paisible d’un piano qui surnage et porte le morceau (Sorry, but we don’t hear you, Ureterp, July, le morceau d’ouverture A French composer ou l’envoûtant Little duck, when is your day ? où les notes commencent par s’allier au doux bruit des vagues)... Tout concourt à installer un climat magique, éminemment cinématographique, nocturne par essence. De brefs interludes en longues plages ouatées, fourmillant d’idées derrière leur calme apparent, ce disque glisse tel une marée, en flux et reflux, laissant régulièrement apparaître l’une ou l’autre aspérité évocatrice, ou s’autorisant une excursion glaciale de 7 minutes (Machine planet) d’une densité dévastatrice.
Reimer Eising, dont le talent ne cesse d’impressionner, tant sur disque qu’en live (sa prestation lors de la soirée U-Cover du 20 novembre 2004 aura constitué pour nous un indéniable point d’orgue de l’année), se montre ici orfèvre de profondeur et de subtilité. Conviant ça et là samples vocaux ou bruitages de machines, jouant en permanence sur la corde raide tant l’absence délibérée de rythmes peut représenter une gageure, il se montre capable de ciseler des mélodies sublimement belles (Four eyes at a gate, Wim Hoffman) et nous gratifie ici d’une oeuvre intensément belle, révélant une grande maturité et potentiellement séduisante pour toutes les oreilles.
Se détachant, par sa profondeur d’inspiration et la plénitude du climat qui en émane, de disques d’electronica rythmée même excellents, cet album achève d’installer son auteur parmi les musiciens les plus talentueux de sa génération, dont l’on veillera à suivre les traces pas à pas.
le 25/01/2005