du 29/11/2007 au 02/02/2008
Centre Culturel Canadien,
Paris
Artistes d’une quarantaine d’années, Lisa Klapstock et Paulette Phillips n’avaient jamais encore eu les honneurs d’une exposition monographique en France. Attentif aux productions photographique et vidéographique contemporaines, le Centre culturel canadien de Paris pallie ce manque en proposant une présentation des travaux de ces deux habitantes de Toronto.
En ce qui concerne Lisa Klapstock, on retrouve ici des œuvres extraites de deux de ses séries les plus célèbres : Ambiguous Landscapes et Threshold. Dans la première, cinq vidéos sont mises côte à côte, optant pour une vision des paysages et lieux proche de la synecdoque (cadre centré sur des marches pour figurer un escalier, gros plan sur quelques arpents de brousse pour évoquer une immensité en friche). Dans ces espaces dont on ne détermine guère la taille, apparaît épisodiquement une présence humaine, comme écrasée par son environnement (sentiment renforcé par le contraste instauré entre les couleurs : rouge de ses habits, vert et gris de ce qui l’entoure) et qui ne fait que passer dans ce plan fixe, rappelant la permanence de la nature et le caractère éphémère de l’homme. La seconde série reprend cette même approche rhétorique en s’attachant à un détail ou à un objet pour en faire un révélateur du quotidien. De fait, il s’agit, dans une démarche mi-voyeuriste, mi-entomologiste, de prendre en photo des jardins et arrière-cours par un trou ou une fente de palissade. Dénués cette fois-ci de référence humaine, les clichés de la série Threshold ne retiennent donc qu’une chaise de jardin, une porte-fenêtre ou un tuyau d’arrosage, propres à dévoiler le mode de vie des habitants des pavillons considérés. Inédite, la vidéo Field Studies constitue la dernière œuvre en date de Lisa Klapstock. Juxtaposition de deux grands écrans diffusant chacun un plan fixe d’une foule en mouvement, la création met en regard celui de gauche, surexposé et tirant alors vers le blanc, et celui de droite, au focus trouble, se nimbant d’un flou artistique. Face à ce rapprochement, le spectateur hésite entre la perte de repères, le brouillage et le relatif confort de ce qui demeure imperceptible.
À côté de ces travaux, les vidéos de Paulette Phillips choisissent d’introduire une dose de mystère, voire de merveilleux. Ainsi, Floating House nous représente une maison qui s’enfonce peu à peu dans un lac, tanguant de plus en plus maladroitement et prenant l’eau de toutes parts. Les échos des conversations et de la vie passée de l’habitation, mêlés à des nappes sombres et inquiétantes, installent le court-métrage dans une tension dramatique certaine. Tout aussi étrange, It’s about how People judge Appearance montre la Canadienne se cogner plusieurs fois et volontairement la tête contre un coin de mur et se relever le visage ensanglanté. Non expliquée, la dimension scarificatrice d’un tel geste est cependant atténuée, voire moquée, par le cadre matelassé rose qui entoure l’écran. Enfin, Monster Tree permet à l’artiste de poser sa caméra au milieu des badauds et touristes, devant les chutes du Niagara. Un grondement sourd au loin, dont on pense qu’il s’agit du tumulte des chutes ; peu à peu, la caméra recule et s’attarde sur un gros arbre dont les nœuds semblent former une tête difforme. Modifiée numériquement, à la manière des Ents du Seigneur des Anneaux, celle-ci va se mettre à respirer, expliquant les grognements entendus depuis le début du film.
le 08/01/2008