du 25/09/2008 au 18/01/2009
Palais de Tokyo,
Paris
Suivant la tradition mise en place l’an passé, l’automne constitue l’occasion pour le Palais de Tokyo de confier ses espaces à un artiste qui s’y voit offrir une carte blanche. Après Ugo Rondinone, c’est l’Anglais Jeremy Deller qui officie cette année avec un ensemble à l’intitulé aguicheur (D’une révolution à l’autre) et qui ambitionne de tracer des parallèles entre révolutions industrielles et culturelles.
Malheureusement, et bien que le programme l’avoue sans honte, la plupart des objets ici présentés « ne s’appréhendent pas toujours en tant qu’œuvres d’art ». De fait, les principales salles du Palais de Tokyo, avec leurs accumulations d’objets hétéroclites, de banderoles ayant servi à diverses manifestations suspendues au plafond et leurs nombreuses vitrines, ne fonctionnement nullement comme geste artistique mais relèvent davantage au pire du vide-grenier, au mieux d’une approche socio-anthropologique. De même, la salle consacrée à la révolution russe de 1917, et aspirant à faire le lien avec les premiers pas de l’électronique (via la figure de Léon Theremin), n’apporte rien de nouveau non plus ; les différents documents d’archives ne parvenant pas à s’extraire de leur dimension historique. On passera également sur l’espace dévolu au Golf Drouot, ce thé dansant parisien ayant abrité les débuts des yé-yé, et la série de petites peintures de William Scott, évocations de San Francisco qui peinent à se faire politique alors que la matière était là.
La seule salle réellement convaincante de l’ensemble se révèle donc être 1760-2008 « Tout ce qui avait solidité et permanence s’en va en fumée » (phrase extraite du Manifeste du Parti Communiste), centrée sur l’Angleterre et faisant le lien, dans le respect du postulat initial, entre révolution industrielle et mouvements musicaux des années 1970-80. Mentionnons à cet égard quatre œuvres ou propositions en débutant par la célèbre photo (utilisée notamment sur la pochette de l’excellent premier album de Black Box Recorder) du catcheur-travesti Adrian Street, posant à côté de son père, mineur de fond, sous le regard éberlué des collègues de ce dernier, lampes sur le front et bottes aux pieds. Dureté et rudesse du travail à la mine font ainsi face à la flamboyance glam des platform boots et de la tenue scintillante. Toujours dans cette veine glam, Jeremy Deller et Scott King choisissent d’évoquer la tournée Ziggy Stardust (via quelques photos de scène ou le tracé du trajet effectué par David Bowie) pour souligner qu’elle débuta en 1972, la veille du Bloody Sunday. Direction Manchester enfin avec, d’une part, l’arbre généalogique de Shaun Ryder, mettant en exergue ses ancêtres ouvriers et mineurs de fond, et, d’autre part, une vitrine dédiée au Free Trade Hall. C’est en effet dans cette salle où des ouvriers manifestèrent pour le droit de vote en 1819, transformée en lieu de concerts par la suite, que Bob Dylan passa à l’électrique, sous les huées des tenants d’un folk pur et dur, ou que se produisirent les Sex Pistols et les Happy Mondays.
le 06/12/2008