Rodrigo García
Rodrigo García
du 08/11/2007 au 18/11/2007
Théâtre du Rond-Point,
Paris
Quatre ans après Jardineria Humana, Arrojad mis Cenizas sobre Mickey nous permet de retrouver Rodrigo García après être sortis plutôt dubitatifs du spectacle monté en 2003. Pour autant, au-delà de la double polémique lancée avant même les premières représentations parisiennes de ce nouveau spectacle (sur le titre de la pièce, duquel l’auteur a du ôter toute référence à Eurodisney, envisagée dans un premier temps, et sur l’embauche d’intermittentes du spectacle pour se faire tondre la tête en direct sur scène), on était plutôt impatient de voir si le propos de l’Hispano-argentin avait su évoluer.
À ce titre, cette création se fait assez déceptive en ce qu’elle s’avère moins politique que ses textes passés. S’il est vrai que la critique de la société occidentale constitue toujours le cœur des préoccupations de Rodrigo García, ce spectacle laisse poindre une forme de résignation à l’égard de ce modèle de civilisation, comme s’il était vain de continuer à s’y opposer. L’auteur n’abandonne pourtant pas tout propos vindicatif et continue à dénoncer l’obscénité des marques et du paraître (à l’image de cette excellente tirade sur l’apparence des magasins qui veulent absolument ne pas ressembler à ce qu’ils vendent : la pâtisserie se parant des atours d’une parfumerie, la parfumerie de ceux d’une boutique de DJ, etc…). Une fois de plus, cette indécence est mise en regard de celle, beaucoup moins crue aux yeux de García, des corps nus des comédiens, de la fameuse scène de tonte ou d’une séquence de copulation dans laquelle l’occiput fait office d’organe sexuel. Enchaînant ainsi moments performatifs et scènes de happening, la pièce empêche la véritable mise en perspective d’un propos cohérent et élaboré ; de surcroît, la profusion d’actions sur le plateau empêche de pleinement profiter du texte surtitré qui apparaît au fond de celui-ci.
En vérité, on retiendra surtout de ce spectacle quelques performances corporelles marquées par une beauté chorégraphique certaine. Permettant d’écarter toute dimension grand-guignolesque (ce qui n’était pas forcément le cas par le passé), cette dernière se retrouva notamment dans deux moments-clés d’Arrojad mis Cenizas sobre Mickey : la scène dans laquelle les acteurs enduisent leurs corps nus de miel et celle où ils se couvrent de boue. Luisants, musculeux et dégageant un érotisme certain, les comédiens terminent la première en répartissant des petits toasts sur le corps d’un d’eux. Ainsi transformé en simili homme-sandwich, Jorge Horno peut à la fois symboliser le culte du corps et l’assouvissement de l’être humain aux effets qui l’habillent. Lorsqu’il s’agit de se envelopper de boue, les trois acteurs plongent dans un bain de glaise duquel ils ressortent dans un état proche à la fois du stade fœtal (recouverts qu’ils sont de cette couche protectrice) et d’une pétrification mortuaire (la grisaille de la boue vue comme métaphore des cendres). Quelques instants après, Juan Loriente s’allonge sur le sol et ses comparses disposent sur lui des dizaines de paillettes, à la manière d’une préparation à l’embaumement ; le scintillement de celles-ci sur le plateau et ses murs vaut bien alors toutes les diatribes qui l’ont précédé.
Autres dates :
– 13 et 14 mai 2008 : Bonlieu Scène Nationale - Annecy
le 18/11/2007