(Gruenrekorder / Import)
00/11/2009
Electronique
d’incise / Electronica / Expérimental / Field Recordings / Gruenrekorder
d’incise est le projet du Suisse Laurent Peter, basé à Genève et membre du collectif Audioactivity. Nous avions déjà écouté quelques unes de ses productions (on vous conseille par exemple l’electronica crépitante de Les dérives, publié en 2005 et disponible en libre téléchargement sur son site web), plutôt expérimentales et mêlant influences electronica, field recordings et musique concrète. Laurent Peter est extrêmement productif et il est un peu difficile de suivre toutes ses productions (en solo ou avec Cyril Bondi en tant que Diatribes) et netlabels (Insubordination un peu plus porté sur le jazz et l’impro, Audioactivity au spectre assez éclectique mais restant globalement axé sur l’électronique).
L’univers de d’incises interroge. Mystérieux et poétique comme ses titres d’albums ou de morceaux, à la fois sombre et beau, complexe et pourtant immédiatement accessible, le Suisse a tout pour réussir. Par rapport aux dérives de 2005, ce nouvel album se révèle être bien plus dense, faisant la part belle aux field recordings puisqu’il sort chez Gruenrekorder, label spécialisé dans le genre.
Le résultat est surprenant, débutant par de nombreux bruitages un peu inquiétants, chocs métalliques, bruissements, grincements, résonants de toute part, avec une sorte de pincement de corde de violon pour toute mélodie. Une ambiance cinématographique façon film noir, envoûtante, et finalement accrocheuse alors que ce qui n’était que bruitage et abstraction s’organise comme par magie. C’est un peu le même principe qui est repris sur chaque morceau, mais le procédé est suffisamment subtil et les constructions complexes pour que l’on ne parle ici de recette. Quand l’organisation se fait plus rapide et les sonorités plus nettes, les influences electronica de Laurent Peter apparaissent plus clairement. C’est le cas en particulier sur le superbe Regarder La Croix Plutôt Que La Poutre avec sa rythmique concassée mais extrêmement fine, le très instrumental Sécheresse En Périphérie ou encore Insouciance Apparente aux mélodies douces et pointillistes tandis que des samples vocaux dérangés viennent questionner.
Se détachant de toute contrainte de forme, d’incise nous offre ici un album extrêmement riche de pièces plutôt longues (6mn de moyenne) qu’il découpe comme bon lui semble, rompant une structure rythmique et/ou mélodique en place pour faire un break complètement composé de collage de field recordings, enfants jouant dans un parc, annonce dans un hall de gare, souffle bruissant de transports en commun (Trente Ans En Trois Heures), pluie, s’orientant alors vers une sorte d’ambient sombre, urbaine ou industrielle, brèves rêveries pourtant bien ancrées dans le réel.
Un peu comme si Autechre avait abandonné ses machines pour aller capter la vie à l’extérieur, d’incise compose son electronica à partir de samples du quotidien. Un résultat surprenant.
le 07/06/2010