08/03/2003
België,
Hasselt
België / Denzel & Huhn / Festival K-raa-k 2003 / Hangedup / Kiila / Lowfish / Un Caddie Renversé dans l’Herbe
Pour la cinquième fois, le label belge (K-raa-k)3 organise un festival initialement très tourné vers les musiques électroniques, mais qui cette année offrait certainement l’affiche la plus éclectique, passant allègrement d’une electronica au laptop au rock en passant par la pop intimiste.
Celui-ci se déroulait comme lors des 2 précédentes éditions au Belgie à Hasselt, une salle qui semble être un ancien garage et qui offre plusieurs espaces très bien utilisés dans le cadre de ce festival : deux salles servaient aux concerts tandis que dans la troisième, la plus grande, étaient diffusés des court-métrages dont on pouvait pleinement profiter dans de confortables canapés.
Le marathon commença légèrement en retard, et dès 14h20 les 13 groupes enchaînèrent alternant entre les deux salles.
Peu de monde au début pour Un Caddie Renversé Dans l’Herbe dont on ratera le début du concert. Un jeune espagnol, seul avec son laptop qui jouait une musique electronica basée sur les mélodies légères et répétitives, mélangeant joyeusement sonorités électroniques et bruits de clochettes. Joli et très agréable pour le peu que l’on put en voir.
On se dépêche de changer de salle pour ne rien rater du concert suivant, à savoir les finlandais de Kiila. Ils semblent encore être en train de faire la balance quand on arrive. Le groupe est assez important avec jusqu’à 6 musiciens sur scène naviguant entre batterie, guitares, balalaïka, violon, orgue, etc... Il commencent par un drone sur lequel quelques notes de balalaïka viennent se poser, puis un chant fortement influencé par les chants traditionnels scandinaves. Le groupe passe tour à tour à des mélodies enfantines, des drones de guitare avec rythmique post-rock, un duo de voix, s’amuse avec un dictaphone, rendant au bout du compte leur set très vivant. Ils font eux-même preuve de simplicité, et créent un univers propre et dans lequel nous eûmes plaisir à se plonger.
C’est une des révélations du festival, parfois pas très loin de Sigur Ros.
De nouveau un laptop pour Tuk, une curiosité locale puisque celui-ci est belge. Il commence par mêler mélodie de guitare et sonorités typiques du laptop donc guère originales. Pas de rythmiques, mais des nappes à la fois soyeuses et métalliques, quelques cliquetis, puis une lente montée vers un son plus dense avec texture et basse granuleuse avant de remettre la guitare en avant.
Un concert très plaisant mais guère aventureux.
Retour à la scène pop-rock avec Blutch, belges eux aussi, d’où peut-être un certain enthousiasme dans la salle, quelques fans peut-être. Le programme annonçait un duo entre Motörhead et Codeine, un mélange intriguant.
Sur scène, un guitariste chevelu et un bassiste en chemise noire brillante jouent effectivement du gros rock et ça fait du bruit. Mais ils ne s’arrêtent pas entre les morceaux et alterne ce son rock avec des passages très calmes, très lents, aux sonorités toujours aussi rock. Malheureusement une fois que l’on a vu leur deux styles de jeu on se lasse et on quitte la salle.
On en profite pour aller voir quelques court-métrages, dont le très beau Redshift d’Emily Richardson qui semble superposer différent films afin de créer d’étranges effets de lumières dans le ciel nocturne d’un bord de mer.
Retour vers la scène "laptops" pour le concert de Denzel & Huhn dont l’album Time is a Good Thing est sorti il y a quelques mois chez City Centre Offices. Les deux allemands mêlent bruitages électroniques et mélodies acoustiques de façon très répétitive, créant alors une musique agréable, douce, mais qui menace souvent de provoquer l’ennui. On en attendait peut-être beaucoup et ce fut une petite déception.
On passe ensuite à Sunroof sur lesquels on ne s’étendra pas : deux guitaristes, l’un en jouant de façon classique, le second avec un archet, ce dernier se lançant parfois dans quelques improvisations au clavier. Cela ne mène nul part, ça tourne en rond en faisant beaucoup de bruit.
On passe alors à Numbers, signé chez Tigerbeat6, mais ça reste là aussi très rock : guitare, batterie et clavier pour les sons de basse. Ils jouent de très courtes chansons aux textes scandés et à la batterie très sèche. Deux titres suffisent à se faire une idée puisque la suite sera du même acabit. Du rock électro énergique.
Changement de registre ensuite avec Joe Cocksucker, groupe formé de quatre musiciens venus du Liechtenstein et annoncés comme un quatuor de laptop. On ne voit pas d’ordinateurs, mais juste une table recouverte de pédales d’effets. Quatre clowns (au sens propre) débarquent sur scène pour un set énergique d’une quinzaine de minutes. Un premier titre tout à fait dans la lignée de Massimo avec un tube dansant noyé dans les effets, un second plus proche de V/Vm qui mélange musique traditionnelle et chant rock en boucle.
Partis aussi vite qu’il sont arrivés, Joe Cocksucker est peut-être le groupe qui à le mieux su faire le lien entre les laptopers et les rockers, mais on se demande toujours quelle était la part de live dans leur set puisqu’ils ne faisaient que de tourner des boutons sur les pédales, et la vidéo était étrangement synchro avec la musique.
Ce concert reste néanmoins un des grands moments du festival.
Dans la même salle enchaîne Hangedup, groupe signé chez Constellation chez qui ils ont déjà sorti deux albums. La formation a de quoi surprendre avec uniquement batterie et violon. Le batteur frappe très fort utilisant toutes les possibilités de son instrument et donnant toute l’énergie des morceaux. La violoniste quant à elle produit un son finalement très rock avec de petites mélodies répétitives aux montées rapidement. Le rythme tenu à un niveau élevé crée une ambiance presque tribale, avec un côté hypnotique créé par la répétition.
C’est extrêmement efficace au début, puis le groupe expérimente un peu plus, la violoniste s’amusant avec toutes ses pédales d’effets pour se sampler elle-même notamment. Le public en redemandera et Hangedup est le seul groupe qui nous offrira un rappel.
Retour au calme ensuite avec Greg Weeks, un petit bonhomme à lunettes et en chaussettes, assis en tailleur sur une table, uniquement muni d’une guitare. Le public s’assoit et écoute calmement ses petites chansons de pop intimiste. C’est à la fois simple et très joli, et le personnages fait preuve d’humour en discutant entre chaque morceau. Devant lui, se trouve un gros cahier dont il tourne les pages pour trouver quelle chanson il va nous jouer et le public semble conquit.
Entre les laptop et le rock Greg Weeks apportait encore un autre son à ce festival décidément très riche.
On profitera du passage sur scène de Hellfire pour aller se restaurer. En revenant ils étaient encore sur scène, nous donnant l’impression de voir une version féminine de Numbers (5 musiciens dont 4 filles), avec le même son électro-rock et des textes scandés.
On se dirigera directement vers la salle dans laquelle se produisait quelques minutes plus tard Lowfish, canadien signé sur le non moins canadien label Suction qui remplaçait un petit groupe inconnu. Connaissant déjà l’artiste on ne fut pas surpris par sa musique, si ce n’est qu’elle prenait ici véritablement une dimension dansante. Electronica mélodique ou électro-pop instrumentale, légères influences 80s, et quelques belles réussites avec montées d’arpèges mélodiques très prenantes. Un très bon concert devant un public très très calme...
Pour terminer, Tony Conrad, un grand monsieur de la musique minimaliste, encore un américain en chaussettes, et encore un américain qui commence son concert par un "Fuck Bush !!" après quoi il nous joue en guise d’introduction un petit morceau en passant son archet sur un billet vert, provoquant quelques grincements.
Après avoir tiré une grande toile devant la scène sur laquelle se projetait son ombre, la suite de son concert consistait en un long drone sur lequel se ballade un violon grinçant que l’on abandonnera après une petite demi-heure.
Au final ce fut un excellent festival, un concentré éclectique de découvertes dans un cadre sympathique et adapté, et avec une organisation irréprochable.
le 13/03/2003