Shalabi Effect - Diagonale Stable

Le premier groupe à jouer ce soir est un jeune duo, Diagonale Stable, qui a pourtant sorti une impressionnante flopée de disques en autoproduit. Ils sont installés face à face, avec chacun une table pour accueillir leur barda, guitare posée à plat pour l’un, baladeur à cassettes et table de mixage pour le second.
Il est très appréciable de les voir essayer des trucs, expérimenter, parfois pour un résultat un peu bancal, mais aussi souvent avec beaucoup de bonheur. Ils réutilisent des outils souvent vus chez des musiciens qui font sûrement partie de leurs influences, les petits moteurs de ventilateur de poche de Keith Rowe par exemple, et se les réapproprient, les mixent avec les sources de bruit qu’ils ont pu trouver à la maison, telle cette vieille trompette jouet.

Shalabi Effect s’installe ensuite rapidement. D’entrée de jeu, le concert se tourne vers une douce cacophonie aux sonorités très improvisées. Un seul morceau, le deuxième, rappelle les débuts du groupe, avec la guitare pleine de réverb d’Anthony Seck qui fait face aux mélodies moyen-orientales de l’oud de Sam Shalabi et des tambourins de Will Eizlini. Cette composition est l’un des rares moments où la musique semble sur des rails, avec des côtés accrocheurs et évidents.
Mais la plupart du temps, les musiciens cherchent des structures moins évidentes : à chaque moment, la ligne directrice peut être changée du tout au tout par une note de clavier impromptue ou bien un bruit de clochette. Cette volonté de concevoir une musique qui laisse l’auditeur toujours sur le qui-vive ne leur fait pas perdre de vue une autre de leurs aspirations : les sonorités sont agréables à l’oreille, seul leur mélange tend vers l’incongru. Cette résistance à la tentation du geste pour le geste, du jusqu’au-boutisme conceptuel fait de Shalabi Effect un groupe dont chaque concert laisse dans l’attente du suivant.

Bertrand Le Saux, Soizig Le Calvez
le 11/05/2003