16/08/2003
Fort de St Père,
St-Malo
2 Many DJ’s / Black Dice / Festival Route du Rock 2003 / Fort de St Père / Manitoba / Prefuse 73
A peine levés, on se dirige vers la plage de Bon Secours où Kieran Hebden (Four Tet) vient de commencer son set. Il ne se tracasse pas trop, commençant par pousser des disques prémixés en mangeant. Set très calme, un peu endormant en cet après-midi balnéaire gorgé de soleil.
Après nous être nous-mêmes sustentés, on se dirige vers le Palais du Grand Large pour se réveiller avec Prefuse 73 qui commence son concert avec 45 minutes de retard. C’était l’une de mes grosses attentes du festival, vu le bien que j’avais entendu et lu à son propos. Je ne fus pas déçu : l’abstract electro-hip hop de Scott Herren est extrêmement aboutie et plaisante. Il cisèle de très jolies mélodies électroniques sur un lit de scratches et de breaks. Son set (où il officiait aux machines, dont un clavier programmé, accompagné d’un DJ scratcheur) fut apprécié à son juste niveau par un public enthousiaste. A noter qu’on faisait la chasse impitoyable aux appareils photo à l’entrée : Scott refuse catégoriquement le moindre cliché, sinon il prévient qu’il quittera la scène...
Arrive ensuite une autre grosse attente en la personne de Manitoba. Les profondes différences de style entre les deux albums laissaient présager certaines surprises. Il y en eut : d’abord l’apparition de Dan Snaith et ses deux acolytes vêtus d’un survêtement rouge et affublés de masques d’oursons, ensuite la présence de deux batteries (plus exactement d’une batterie et de percussions) et enfin la couleur très psyché que prennent les compos en live, ce que le très bon Up in Flames ne laissait qu’imparfaitement entrevoir. On se trouve comme plongés dans un vibrant hommage à My Bloody Valentine, Spiritualized, Spacemen 3, Chapterhouse... sans oublier les influences californiennes revendiquées.
Aux volutes batteries-guitares s’ajoute la fraîcheur d’une très nette dimension pop. La couleur electronica du premier album Start Breaking My Heart se voit diluée, sans pour autant disparaître, dans les motifs électro-psyché très bien mis en valeur par le double jeu de batterie énergique. C’est à la fois roots et aérien, baggy et noisy, planant et fougueux, rock et électronique. L’accent est mis sur le rythme mais Dan livre de temps à autre des vocaux parcimonieux et éthérés. Sur la fin du set, on a droit à un long passage quasiment tribal de toute beauté. Conquis, le public obtiendra un rappel. C’est décidément au Palais que l’on profitera des meilleurs concerts.
Arrivé tardivement au Fort pour cause de retard au Palais et de rencontre avec Dan Snaith, je rate sans trop de regrets Syd Matters. Quant à Buck 65, je le verrai finalement le dimanche lors de son deuxième set. Je commence donc en force avec l’un des tout meilleurs concerts du Fort, celui de Black Dice qui m’avaient déjà enchantés au België en mai lors du festival Fat Cat. Le groupe s’installe discrètement et déconcerte les festivaliers qui attendaient certainement quelque chose de plus immédiat. Pas mal de gens quitteront d’ailleurs les premiers rangs. Il faut dire qu’avec une pièce unique de 35 minutes sans construction apparente, truffée d’expérimentations sonores et quasi complètement dépourvue de rythme, le pari en festival était osé...
Bien des oreilles furent toutefois séduites et enthousiasmées par les 5 mouvements qui composent le morceau. Les 2 premiers constituent une ample intro faite de bruitages mi-aquatiques mi-spatiaux et de notes de guitare égrenées. Par-ci par-là, une frappe de batterie, un balaiement de cymbales. Plus le set avance, plus le quatuor convainc avec l’alchimie mystérieuse qui opère entre eux. La batterie prend de l’ampleur, la guitare fait écho aux sons générant une impression d’odyssée interstellaire. Vraiment excellent, mais trop court...
On passe rapidement sur le punk-baggy pop sympa des Hot Hot Heat, plaisant mais répétitif, et sur le hooligan-rock (pour schématiser) des Yeah Yeah Yeahs. Trop bruitiste et approximatif, et certes la chanteuse a de la présence scénique, mais ses beuglements finissent franchement par exaspérer.
Grand moment agréable pour terminer cette deuxième journée : nos compères gantois des 2 Many DJ’s s’emparent des platines et, fidèles à leurs habitudes, passent à la moulinette avec maestria une foule de tubes pop, rock, dance et tutti quanti. Ce fut éminemment plaisant, sans être exceptionnel, et on regrettera qu’en dehors de la "fosse", les spectateurs soient restés poliment attentifs mais un peu amorphes. L’excès nuirait-il parfois ? La suite demain...
le 22/08/2003