Vector Lovers : Chronique d’un non-concert

 date du concert

15/10/2004

 salle

Batofar,
Paris

 tags

Batofar / Vector Lovers

 liens

Vector Lovers
Batofar

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Notre dernier concert au Batofar, c’était en juin dernier, pour Matmos. Une soirée où nous avions connu quelques déconvenues, que ce soit au niveau de l’organisation ou de l’attitude de l’équipe du Batofar envers leur clientèle. Mais depuis juin, les choses ont encore changé. Après être devenu une boite de nuit début 2003, le Batofar continu sa métamorphose, telle la grenouille qui voulait devenir plus grosse que le boeuf, désireux de transformer la petite salle de concert attachante en une world company sans âme, si ce n’est celle d’un Picsou même pas drôle.

On venait donc ce soir pour voir Vector Lovers, dont notre ami belge avait déjà vanté les mérites dans ces pages. Martin Wheeler est anglais, il a créé le micro-label Iwari sur lequel il a sorti quelques vinyls, se faisant ainsi remarquer. A tel point que c’est chez Soma que sortait son véritable premier album, il y a une quinzaine de jours. On fut d’abord un peu surpris par cette signature sur le gros label anglais car ce que l’on avait entendu de Vector Lovers était très fin, très mélodique, et ressemblait plus à de l’electronica qu’à une variante de techno. Mais en y prêtant une oreille plus attentive, on retrouvera dans ses rythmiques efficaces de fortes influences électro des années 80. Il faut dire que Martin Wheeler est fan de Depeche Mode et Kraftwerk.
Malheureusement, ce soir nous n’en saurons pas plus sur Vector Lovers. Il est vrai, ça nous emmerdait un peu de sortir dans le froid et la pluie pour venir au Bato à 23h, début prévu de la soirée, ou plutôt ouverture des portes. Mais on était content de découvrir Vector Lovers en live, on n’en aurait peut-être plus l’occasion. Arrivée vers 23h20, on achète notre place : 12 euros. On remarquera que c’est fini les soirées avec 3 lives intéressants à 7 euros, mais bon, ça fait un moment qu’on ne fait plus attention aux pratiques commerciales de cette salle. Pas un chat dans la salle, 5-6 personnes au bar à l’arrière du bateau, on décide de prendre notre mal en patience dans le petit hall, au niveau de la régie, feuilletant quelques flyers de salles généralement du même acabit : bars-clubs aux programmations plus inintéressantes les unes que les autres.
Bref, on se fait royalement chier pendant qu’un DJ tente en vain de mettre le feu dans une salle vide. Heureusement, un videur viendra nous faire la causette, nous expliquant qu’on ne peut pas descendre dans la salle avec nos sacs (un petit sac à dos, tout ce qu’il y a de plus classique), et qu’on doit les laisser au vestiaire (2 euros par article). On en prend note, en lui disant que pour l’instant on est pas descendu, et qu’on verra ça en temps utiles puisqu’apparemment le concert n’est pas près de commencer. Sur quoi, on nous laisse tranquille. On papote un peu, et quelques minutes plus tard, ce sont deux videurs qui nous abordent. Faut dire que vu le monde présent dans la salle, ils doivent tout autant s’emmerder que nous. Même reproche que tout à l’heure : il faut laisser notre sac au vestiaire. On s’explique, en répétant ce qu’on a dit un peu plus tôt, qu’on est venu pour voir un concert et que tant qu’il n’est pas commencé on restera là, sans descendre dans la salle, et que par conséquent on garde notre sac avec nous. Là dessus l’un des deux molosses nous dit que si l’on est venu pour voir un concert on ne va pas rester dans le hall et que par conséquent, on devra laisser notre sac au vestiaire. Etant donné que quelques mois plus tôt on pouvait entrer avec son sac, je demande depuis quand c’est interdit, mais je n’obtiens pas de réponse. Alors forcément le ton monte un peu, mais les videurs restent zen. Faut dire que vu mon gabarit, ils n’ont pas grand chose à craindre, et j’exige alors une réponse. Le videur en chef, reconnaissable à l’oreillette Jean-Luc Delarue ôte son appendice auditif et m’explique d’un discours très commercial : "En effet, c’est nouveau. C’est le patron qui a pensé que c’était mieux de dire aux gens de laisser leur sac au vestiaire plutôt que de les fouiller à l’entrée.". Aaaah, la voilà donc l’explication, le règlement à changé, mais bien sûr, rien n’est affiché à l’entrée pour préciser ce point. Mais bon, il faut toujours se méfier des patrons qui se mettent à penser, ils peuvent être dangereux. Avec le nouveau Batofar, vous pourrez rentrer avec un flingue ou un couteau dans votre sac, vous n’êtes pas fouillés. Vous pourrez même en faire usage, du moment que vous restez dans le hall ou bien au bar. Enfin bon, il faut le comprendre le patron. C’est bien plus rentable d’obliger les gens à laisser leurs affaires au vestiaire que de les fouiller à l’entrée.
On passera donc le reste de notre temps dans le hall, sous le regard vif du videur en chef, bien décidé à ne faire aucun cadeau à cette équipe de bras cassés. Le public arrive petit à petit, les uns faisant une papouille au videur, les autres à un autre membre de l’équipe. Mais où est donc le véritable public ? Un peu plus tard un couple débarque, sac à dos sur les épaules. Ils prendront assez bien la remarque du videur à ce sujet, lui faisant quand même remarquer que c’est pas vraiment cool comme attitude, puisque rien n’est affiché à l’entrée pour avertir qu’on devra laisser nos affaires au vestiaire.
0h30, toujours rien, 20 personnes peut-être dans le Bato. C’est décidé, on se casse. Si l’on restait, notre chronique du concert de Vector Lovers ferait une publicité indirecte à une salle qui ne mérite que notre mépris (un sentiment visiblement réciproque), et qui se fout royalement des artistes qui y sont programmés. Et puis ce fut une certaine satisfaction de ne pas céder et donner raison à ce caprice de patron via ses videurs. On partira donc la tête haute, en prenant soin de faire nos adieux au videur. Adieux qu’il nous rendra (quand je disait que c’était réciproque).

Etant donné que c’était la dernière fois que l’on mettait les pieds dans cette salle, on ne pouvait pas partir sans faire une petite blague qui nous démangeait depuis des années. Des années que l’on venait au Batofar, et qu’on parlait de leurs soirées, et qu’à chaque fois que l’on partait, après les concerts, laissant la place aux DJs, on voyait une file d’attente de gens venant là pour danser. Des années qu’en sortant alors que tout le monde voulait rentrer, on avait envie de leur dire que c’était fini, que la soirée était finie.
C’est ce que l’on a fait ce soir alors que 3-4 personnes étaient à la caisse. Une jeune femme réagira, étonnée : "Comment-ca c’est fini ? Qu’est-ce qui est fini ?".
Le Batofar, c’est fini.

Fabrice ALLARD
le 17/10/2004

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