Minexio III

 date du concert

05/10/2004

 salle

Cave 12,
Genève

 tags

Cave 12 / Minexio III

 liens

Cave 12

 dans la même rubrique

La Cave 12 accueille ce soir Minexio III, soit les deux seuls membres de Reynols que l’on ait jamais vus, avec un troisième larron. Reynols n’existe plus, nous disent-ils, et pourtant ils n’ont pas l’air bien différent du visage qu’ils offraient sur scène il y a 2 ou 3 ans. Peut-être apprendra-t-on bientôt que Miguel Tomasin, le leader de Reynols qui parlait aux animaux et composaient des symphonies improbables pour 10000 poulets, n’a jamais joué avec eux. Cela nous ferait une jolie oeuvre d’art sur la manipulation du marketing dans le petit village global du rock expérimental.

La formation se compose de deux guitares et d’une batterie, le batteur échangeant son rôle avec l’un des guitaristes suivant les morceaux. La structure des morceaux est un peu toujours la même, des notes patiemment répétées à l’infini. Cela évoque des ragga indiens, où bien la musique minimaliste de La Monte Young, ce qui revient peut-être finalement au même. Il est surprenant de constater qu’il ne leur faut pas grand chose pour arriver à un résultat captivant. Sans vouloir diminuer leur mérite, la main gauche des guitaristes peut passer de longues minutes crispée sur le même accord. Ce qui produit les nuances, ce sont les effets apportés. Effets de guitare bien sûr, mais aussi de voix (une sorte de chant exotique bi-tonal), ou provoqués par les nombreux petits gadgets qu’ils utilisent : guêtres couvertes de clochettes (!), petit instrument rythmique joué avec les dents, pipeaux, micro-contact dans une pochette de disque...

La musique de Minexio III a une qualité qui la sort du lot : on sent que quelque chose nous résiste. En général, il y a moyen de trouver des musiciens, des disques qui correspondent exactement à ce qu’on attend, et quand bien même irait-on fouiner dans l’improvisation la moins musicale, on n’y trouve aucune aspérité. Ici, c’est exactement l’inverse, peut-être cela vient-il du décalage entre la musique et la manière dont elle est produite, peut-être est-ce ce look de punk de supermarché en santiags, toujours est-il qu’on ressent le besoin d’y revenir.

Ils sont rejoints pour le dernier morceau par trois argentins résidant par chez nous. Ils jouent d’instruments acoustiques, des guitares normales et d’autres de dimensions réduites : seule la largeur du manche est préservée, la caisse a la forme d’une petite calebasse et le manche est raccourci. S’il s’agit des intruments traditionnels de la musique argentine, on comprend alors l’origine de ceux des Minexio : ce ne sont que la version électrifiée de ces guitarettes. Le Morceau reprend les bases posées par le groupe, mais ici la maîtrise technique des nouveaux intervenants permet de partir à la découverte de nouveaux décors. Cela s’intègre bien car il faut dire qu’ils jouent doucement, sans trop s’imposer. Les arpèges s’enchaînent dans une montée de volume qui profite de la puissance du nombre ; on retrouve le schéma de morceau à climax cher aux improvisateurs et aux groupes de post-rock, peut-être tout simplement parce que c’est ce qu’il y a de plus facile quand on ne se connaît pas très bien.

On remonte alors l’escalier sombre de la Cave 12 avec une bonne impression, plus positive finalement que le souvenir affadi du dernier concert de Reynols. Peut-être parce que leur musique s’apprécie surtout dans l’instant ; il faudra donc attendre le prochain passage du groupe (ou de sa prochaine moûture) pour en profiter.

Bertrand Le Saux, Soizig Le Calvez
le 27/10/2004