Insight Project #01 : Pan Sonic / Dither

Une bien belle affiche pour cette première soirée Insight Project, avec Pan Sonic que l’on n’avait pas vu depuis bien longtemps et dont on se faisait une joie de revoir après la sortie de leur colossal Kesto. En première partie, un artiste dont on parle régulièrement sur ces pages, resté trop peu connu à notre goût, et cantonné à une sphère industrielle alors que son travail, certes sombre, se situe dans la droite lignée des premiers albums d’Autechre. Une affiche étrangement excitante, à la fois originale et cohérente, permettant à des gens comme nous de voir deux superbes concerts d’un coup, et à d’autres de découvrir Dither en première partie.

C’est donc Dither qui prend place sur scène après un DJ-set glacé et noisy de DJ K.Oz, diffusé à un volume sonore qui nous fera fuir la salle. Vers 20h45 tout le monde s’approche de la scène, et c’est à se moment que l’on se rend compte que le public éparpillé au bar rempli fort bien l’espace dédié aux concerts. Plutôt une bonne nouvelle qui laisse présager d’un bel avenir à ces soirées pour peu que la programmation reste intéressante.
Dither réclame que l’on baisse l’intensité lumineuse des spots et commence son live avec un superbe morceau qu’il prolongera pendant près de 10 minutes, et on s’en réjouira : nappes ambient, mélodie répétitive fine et fort séduisante, puis lente montée rythmique joliment construite, mêlant un certain ascétisme mathématique au lancement impromptu de bruitages plus durs et industriels. Très beau mélange, posé, étudié, qui s’opposera aux bruitages frénétiques et quasi ludiques du morceau suivant, plus barré malgré ses nappes glacées. La suite naviguera entre ces deux extrêmes, avec des parties mélodiques toujours gracieuses, portées par des arpèges qui nous feront décoller, et un travail rythmique riche en effets de syncopes, jusqu’à un final plus classique, downtempo et chaleureux.
Globalement un très bon concert, mais que l’on aura eu un peu de mal à apprécier sur le moment. Peut-être l’effet du volume sonore toujours trop élevé dans cette salle, de la chaleur ou encore d’une accumulation de fatigue.

Pourtant, tout semble aller mieux alors que Pan Sonic entre en scène. Mika Vainio à gauche, Ilpo Vaisänen à droite, avec devant eux deux-trois machines et effets. Un équipement aussi minimal que leur musique, et derrière eux un écran projetant, comme à chacun de leur concert, la forme de l’onde sonore que l’on entend. On reconnaît les vieilles machines tout droit sorties d’un musée pour Vaisänen qui se produisait en solo au Batofar en début d’année, tandis que Vainio est équipé d’un sampler. On devinera donc que ce dernier était responsable des rythmiques, tandis qu’Ilpo Vaisänen produisait les longues textures granuleuses aux lentes évolutions.
Le concert débute de façon relativement efficace, mais l’accent est mis sur les parties bruitistes, les vrombissements de sinusoïdes saturées, pour une sorte de symphonie pour scies sauteuses. Le public se manifeste une ou deux fois, quand la rythmique se fait plus accrocheuse, dansante, métronomique aussi, utilisant des sonorités de vieilles boites à rythme conférant un charme rétro à leur techno industrielle. Petit à petit on trouvera les morceaux de plus en plus efficaces, de plus en plus durs aussi, et on se prend à imaginer ce set dans une rave sauvage au milieu de friches industrielles.
Un concert dense, puissant, efficace qui aura visiblement convaincu tout le monde de rappeler le duo pour un rappel relativement long, d’abord dans la lignée de leur concert, puis se prolongeant par leur soucis du travail sur la matière sonore avec la lente descente d’une texture granuleuse pendant laquelle on se demandait si le duo finlandais cherchait à produire un son bien précis, ou à faire un joli dessin sur l’écran placé derrière eux et sur lequel il jetaient quelques coups d’oeil.
Toujours est-il que l’on quittait le Triptyque ravi par cette soirée, et enchanté par ce concert de Pan Sonic.

Fabrice ALLARD
le 31/10/2004