24/03/2006
Beursschouwburg,
Bruxelles
Bauri / Benge / Beursschouwburg / Expanding Records / Holkham / Plexiphonic / Stendec
Après une première soirée consacrée, en novembre 2004, à U-Cover, c’est le label Expanding Records qui se voyait mis à l’honneur par l’efficace association belge Plexiphonic (espérons, du reste, que la "série" ne s’arrêtera pas en si bon chemin). Proposant à nouveau quatre lives, la structure avait cependant choisi de changer de lieu, passant des Bains::Connective au Beursschouwburg. Plus centrale (cinq minutes de la Grand’ Place, deux de l’Ancienne Belgique), plus confortable (une véritable salle avec gradins en lieu et place d’une piscine vidée), plus institutionnelle aussi (ce qui s’avère utile en termes de co-production), la salle située près de la Bourse se révéla idéale pour accueillir une telle soirée, immanquable s’il en est. On ne put d’ailleurs, à son issue, qu’en saluer l’organisation aussi bien sur le terrain de l’opportunité (les Bruxellois peuvent s’enorgueillir de se voir proposer de tels événements) qu’au niveau pratique (horaires impeccablement respectés, gradins permettant de s’asseoir ou s’allonger, bar et salle de concert clairement séparés).
Peu avant 20h30, c’est Holkham qui, le premier, prit place, devant une trentaine de spectateurs (ce qui fut la moyenne de toute la soirée, avec des pointes jusqu’à une quarantaine). Auteur d’un très bon album d’electronica-ambient il y a deux ans, l’Anglais installa des nappes comparables à un bruit de trafic routier, agrémentées de sonorités semblables à l’écoulement d’une gouttière ou à une fine pluie battant le pavé. Contrastant avec cette musique très urbaine, les projections d’Ewo (responsable de Plexiphonic et illustratrice patentée de nombreux concerts electronica en Belgique) se voulaient plus oniriques, proposant constellations d’étoiles et volutes de fumée. Faisant intervenir des glitchs (crépitements, déchirures, frottements) comme en contrepoint au caractère accueillant des textures, Simon Keep emmena sa musique aux textures superposées vers une évanescence certaine. Pour autant, on ne fut pas complètement emballé par sa prestation, ne parvenant pas à véritablement rentrer dedans ; peut-être était-ce peu évident pour lui de débuter la soirée et que, placée plus tard, sa musique nous aurait fait davantage d’effets ? D’un autre côté, l’agencement des lives avait été réalisé afin d’aller de l’artiste le plus arythmique à celui offrant le plus de pulsations, un parti pris tout à fait défendable.
Ce fut ensuite Benge qui s’installa derrière ses machines (laptop et table de mixage) et débuta son set par Adam-Age Loneliness, un de ses superbes tubes, tout en mélodies touchantes et rythmiques soignées, qui lui permirent de s’affirmer comme l’un des tous meilleurs artistes d’electronica mélodique. Alternant pièces plus "pop " et morceaux plus ambient, Ben Edwards laissait toutefois poindre en permanence une mélancolie certaine, qu’elle vint des notes de piano ou de la coloration conférée aux nappes. Développant par ailleurs des rythmiques faites principalement de vents électroniques, l’Anglais livra une prestation qui nous réconcilia pleinement avec sa musique après la déception engendrée, l’été dernier, par I Am 9 (au reste, la grande partie des morceaux de ce soir étaient extraits non pas de ce dernier album en date, mais de son prédécesseur, le merveilleux Meme Tunes).
Rejoint par Paul Merritt (Tench), Ben Edwards resta sur scène pour le set de Stendec, ce duo qui fait incontestablement partie, depuis le premier morceau que nous avons entendu de lui, de nos artistes electronica préférés. Associant rythmiques plus marquées et influences plus diversifiées (hip-hop, cut-up), Stendec enchaîna les principaux titres de son album paru en 2004. Alors que Benge semblait s’occuper des plages et mélodies, Tench plaquait ces pulsations à la tessiture si agréable, parfois complexes, parfois plus simples et métronomiques. Cet alliage entre rythmiques ciselées à l’extrême et mélodies à la limpidité (voire à l’efficacité) imparable fit la réussite d’un set qui se termina en beauté par le sublime Avro (précisément ce morceau de leur premier 7" avec lequel nous avions découvert le duo). Les enfants des projections, qui jouaient sur un manège, étaient aux anges, nous ne l’étions pas moins.
Enfin, pour le dernier set, Bauri (aucun album sur Expanding, mais un 7" et, plus largement, une connivence artistique évidente) offrit des titres aux mélodies nettement moins "poppy" que sur son long-format The Slacker Journal (paru en 2002 sur Neo Ouija). Opérant un plus grand travail sur l’interaction mélodies-rythmiques, le Suédois se plaça davantage dans une optique IDM qu’electronica mélodique avec notamment des passages aux beats appuyés et un fond sonore faits de distorsions et saturations. Quoiqu’il en soit, si on était bien loin de l’esprit bubblegum des compositions de son album, sa prestation fut tout à fait convaincante et parfaitement à même de constituer une transition avec le reste de la soirée. En effet, après ces trois petites heures, on pouvait poursuivre la nuit au bar, situé au rez-de-chaussée du bâtiment (la salle de concert était au deuxième étage), où Loden, artiste néerlandais, proposait un set d’IDM tout à fait honorable. On y resta quelques dizaines de minutes avant de rentrer, largement satisfait et reconnaissant envers Plexiphonic d’avoir mis sur pied un tel événement.
le 30/03/2006