01/07/2006
Mandala,
Toulouse
Pour la première fois, en parallèle des Siestes Électroniques, se déroule un festival Off. Il ne s’agit pas là d’une concurrence, mais d’une complémentarité dans la mesure où cette programmation s’intercale entre les dates de la programmation officielle. L’ensemble se fait d’ailleurs dans la bonne ambiance locale puisque la programmation du festival Off est annoncée sur le site et dans le programme officiel des Siestes, avec pour mission de faire découvrir la scène locale.
Ayant fait le déplacement jusqu’à Toulouse pour le festival, il aurait été bien dommage de ne pas profiter d’être sur place pour découvrir une scène locale bouillonnante et un lieu, le Mandala. On apprendra plus tard que le Mandala est principalement connu en tant que club de jazz. Ce soir c’est une programmation toute électronique, dans une salle assez comparable aux Instants Chavirés. On a d’abord l’impression de rentrer dans un bar, des petites tables parsèment l’espace devant une scène similaire à celle de la salle de Montreuil.
La France a déjà battu le Brésil, les voitures klaxonnent à tue-tête, et le Mandala semble presque être hors du temps, loin de l’agitation qui remue le pays. Quand on arrive, le concert de Turntable Lab a déjà commencé, mais certainement depuis peu car nous en verrons près de 45mn. Trois hommes, chacun étant équipé d’une platine vinyle et d’effets variés. On arrivera au bon moment, rentrant tout de suite dans leur mélange de rythmiques déconstruites, mélodies soyeuses et basses brutes. S’agissant d’une performance improvisée, il y aura des hauts et des bas, mais les trois artistes étaient généralement en phase, se répartissant vraisemblablement la tâche équitablement avec au centre DJ Bog’Art, responsable des rythmiques, assez étonnant dans sa manipulation de la platine et de la table de mixage, marquant le tempo par mouvements du disque, samplant son propre travail pour le mettre en boucle, ajoutant diverses couches, et allant, comme dans l’impro acoustique, jusqu’à utiliser le corps de son instrument, ici la platine vinyle, en la frappant de coups de tournevis, ou en faisant glisser ce même tournevis sur le bras de la platine.
Le mélange est souvent très beau, parfois nonchalant avec ces mélodies de claviers jazzy flottantes, flirtant logiquement avec le hip-hop quand les rythmiques montent le ton, avec en plus quelques expérimentations électroniques brutes. Une bonne découverte et une soirée qui s’annonce fort intéressante.
On enchaîne avec Cyle, trio platine-guitare-machine, ce soir en quatuor avec Aymeric de Tapol au laptop dont nous avons déjà parlé suite à son album paru chez Nowaki. Début ambient hypnotique avec sifflements électroniques, nappes, et une rythmique downtempo produite par l’un des membres du groupe dans le rôle de la boite à rythme humaine. Le ton s’alourdit ensuite avec des influences hip-hop plus affirmées de par la rythmique et des basses profondes, mais sur la longueur il semblerait qu’un manque d’idées soit à l’origine des limites de ce concert. La sauce se défait petit à petit, et alors que pour Turntable Lab les mélodies des disques diffusées étaient complètement brouillées, généralement non reconnaissables, ici on devine les extraits de disques et l’abstract hip-hop du début fini par manquer de force et donne l’impression de tourner en roue libre.
Le final sera par contre de toute beauté, encore une fois grâce à la human beatbox au jeu particulièrement fin : rythmique à peine audible sur nappes ambient, sorte de click’n cut acoustique, et lente montée par ajout progressif d’éléments.
On passe ensuite à Côme, initialement annoncé sous le nom de Tellelodz puisqu’il s’agit du projet de Tellemake (vu ce jour même aux Siestes) avec une jeune femme jouant sous le nom de Lodz, tout deux à l’ordinateur, avec en plus un clavier pour Tellemake. Début de concert avec une nappe de basses profondes, quelques samples de violoncelle lancés de manière nonchalante afin de construire une mélodie abstraite et poser une ambiance dérangée par quelques craquements. Pendant ce temps, Lodz ajoute quelques murmures passés aux moulinettes de la reverb et du delay. A la fois hors du temps, en apesanteur de par ses sonorités mélodiques, la musique de Côme nous ramène toujours à la réalité avec ses éléments percussifs métalliques comme ces claquements de tuyaux, tic-tac d’horloges, engrenages mal huilés.
Le principal problème de ce concert, tenait dans l’inadéquation entre le propos (musique plutôt ambient) et l’heure avancée à laquelle le duo se produisait. De plus ce concert de près d’une heure souffrit de quelques longueurs, de longs passages pendant lesquels rien de nouveau n’était proposé, ou aux évolutions trop lentes. D’un autre côté, régulièrement, l’essentiel était là, sublimes passages ambient acoustiques, linéarité des nappes de cordes, ou ondulations de choeurs. Un duo à revoir, à surveiller, une formule qui mérite d’être adaptée, affinée.
Dernier concert de la soirée, Kob I Vento, avec Murielle Edet aux projections. Une présentation toujours amusante avec en guise d’écran un voile translucide déroulé entre le public et la scène, écran derrière lequel on devinera deux hommes à la guitare et au laptop. Murielle quant à elle dirige les projections, principalement des diapositives, avec quelques séquences filmées.
Il devait être pas loin de 3h du matin quand ils commencèrent et à cette heure avancée, c’est exactement ce qu’il fallait pour réveiller tout le monde. Guitare brute, grinçante, saturée, rythmique tout aussi brute faisant penser à des coups donnés sur des plaques de tôle, et mélodie haut perchée façon tintements électroniques. A la fois très rock mais avec une finesse électronique fort bien venue, Kob I Vento joue sur l’hypnotisme avec une musique répétitive et nous propose là une formule originale et tout à fait intéressante. Les projections formaient un bon complément, faisant défiler décharges publiques, murs aux messages gravés, façades d’immeubles, voitures réduites à l’état de tôle froissée, les diapos représentant souvent le même élément vu sous des angles ou à une distance différents.
Sur la longueur le groupe se renouvelle sans peine, tout en gardant cette originalité. Parfois c’est une basse électronique qui est saturée tandis que la guitare se fait plus mélodique et bluesy, à d’autres moments on est plus proche d’un certain post-rock avec des croisements de notes de guitare, mais le groupe garde toujours ce petit côté hypnotique, certainement aidé par des pièces assez longues, d’une dizaine de minute en moyenne.
On ne pourra malheureusement pas voir le reste de cette programmation Off, mais cette soirée s’avéra être d’une excellente teneur, nous faisant presque regretter de ne pouvoir assister aux concerts de Ultralibéral (Nowaki) le mardi 4 juillet, Arco5 le 5 juillet, ou la soirée Annexia le 10 juillet.
Une initiative à renouveler !!
le 02/07/2006