du 02/10/2024 au 06/01/2025
Centre Pompidou,
Paris
Le mouvement social de l’an passé ne nous avait pas permis de venir visiter l’exposition collective des nommés du Prix Marcel-Duchamp (remporté par Tarik Kiswanson, plasticien suivi depuis quelques années sur ces pages). Pour l’édition 2024, toujours présentée dans le même espace et suivant la même configuration de quatre grandes salles successives (une par artiste ou duo d’artiste), on put saluer la belle cohérence thématique des propositions faites par des créateurs issus de deux générations (la moitié étant née entre 1973 et 1975, et l’autre en 1984-85). En effet, le choix est fait de travailler autour du cosmos et du rapport à la nature, sujet certes récurrent dans l’art contemporain mais qui, ici, trouve des déclinaisons à la fois formellement très différentes, tout en interagissant assez bien entre elles.
C’est ainsi qu’au foisonnement visuel de l’installation de Gaëlle Choisne (plateforme basse en liège, parcourable par le public et recouverte d’objets divers dont des téléviseurs) répondent des espaces beaucoup plus épurés chez Abdelkader Benchamma (peintures murales à l’encre) et chez le duo Angela Detanico et Rafael Lain (diffusions vidéos sur deux murs, disque de gravier blanc et maquettes 3D de planètes en métal réfléchissant). Ces options formelles traduisent des inclinaisons de fond puisque Choisne, lauréate du Prix pour cette édition (mais possiblement l’installation qui nous a le moins convaincus, flirtant trop avec le mauvais goût), s’attache à une sorte de monde futuriste, traversé par un imaginaire chargé, alors que les trois autres propositions observent le présent avec un regard un peu distancié, presque scientifique par endroits (la vidéo de Detanico et Lain combine, ainsi, visions microcosmiques d’un champ de blé et images de l’espace, réduites à des nuages de point).
Comme s’il y avait également une recherche géologique, le trait d’Abdelkader Benchamma donne l’impression de recréer des peintures rupestres, tandis que la double vidéo de Noémie Goudal met en images l’effondrement d’une caverne et la disparition d’une forêt. Avec ses deux grandes vidéos, la Parisienne parvient même à documenter à la fois ces enjeux écologiques et la fragilité du médium photographique, grotte et forêt étant saisies sur des papiers photos qui, sous l’effet d’explosions et de l’eau, se décomposent progressivement. Avec ces désagrégations ne subsistent que quelques rares minéraux, tels ces graviers blancs qui composent le disque de Detanico et Lain, posé au sol et éclairé aléatoirement par des projecteurs zénithaux, telles des gouttes de lumière tombant sur un sol pierreux. Le noir et blanc, un peu fantomatique, un peu intemporel, du duo dialogue ainsi avec celui des dessins muraux de Benchamma, dans des gestes à la poésie certaine.
le 17/12/2024