Julien Demoulin

L’exercice du disque de remixes est toujours un peu particulier : après avoir défini s’il s’agit, pour l’artiste concerné, de proposer des remixes faits par lui de morceaux d’autres musiciens, ou bien d’inviter des confrères à agir sur ses propres titres, il faut se demander s’il est pertinent d’accoler morceaux originaux et remixes. Julien Demoulin a choisi cette dernière option, avec, en ouverture d’un nouvel album publié sur sound in silence, un morceau unique divisé en trois parties, pour un quart d’heure original, avant que trois remixes de ce long titre ne soient offerts à l’auditeur.

Composé pour fanfare et synthétiseurs, A Trial Of Distances se déploie donc sur trois mouvements, et met en place un juste équilibre entre nappes posées par les claviers, enveloppantes et denses, et percées plus lumineuses provenant des cuivres et vents, capables de donner une mesure quasi-mélodique au milieu d’une suite d’éléments plus profonds. La division par tiers par Julien Demoulin, un peu factice sur le papier, trouve une légitimité quand on constate que le début de chaque partie se traduit par une forme de relance sonore, avec élan donné aux instruments de la fanfare, davantage perceptibles dans ces commencements.

Le premier remixeur à intervenir est How To Disappear Completely, collectif polonais, pour un résultat trop peu personnel, leur travail peinant à être distinguable au regard de la matière première entendue juste avant. Avec le remix de .foundation (projet mené par Jake Carter), le propos semble se densifier et s’obscurcir, grâce au concours de nappes opaques et tourmentées. Mais, au milieu du titre, de la synthèse granulaire apparaît et l’ensemble prend des atours oniriques : les crépitations paraissent être celles de la pluie, les cuivres et vents refont leur entrée et les montées en puissance sont joliment contrebalancées par des moments de répit.

Reste le dernier remix, œuvre de zakè et long de trente minutes (soit le double des trois mouvements réunis du morceau original). Comme son prédécesseur, l’Étatsunien opte pour un ajout de synthèse granulaire, opérant ici par vagues, dans un flux et flux tout à fait indiqué pour dialoguer avec les entrées et sorties des cuivres et vents. Certes, sur la durée de la demi-heure, le projet n’évolue possiblement pas suffisamment, mais il permet de conclure le disque de belle manière, à la fois un peu enjôleuse et très intense.

François Bousquet
le 07/03/2025