Lea Bertucci + Olivia Block

À force de travailler avec sa voix, dans son saxophone ou sa flûte traversière, Lea Bertucci a décidé d’en faire le cœur de son propos, sur un album réalisé avec Olivia Block (qu’on retrouve donc très rapidement après sa prestation au Festival Variations). Sur deux longues plages (douze et vingt-deux minutes, respectivement), les deux musiciennes mêlent ainsi souffle humain, field recordings, sons issus de cassettes et travail au synthétiseur. L’intitulé de ce long-format, reprise d’une phrase de la Pythie de Delphes, traduit bien cet attachement à la voix et à ce qu’elle peut charrier, à la fois comme parole performative mais aussi comme matériau constitutif, en soi, d’un ensemble.

Sur les deux morceaux (subtilement intitulés The Number of the Sand et The Measure of the Sea), la voix de Lea Bertucci se fait surtout identifiable au début, respiration lente et paisible, avant que n’interviennent les autres composantes, qui la recouvrent assez rapidement, pour déployer des compositions à la granulosité certaine, dans une ambient expérimentale composite qui ne rechigne pas à quelques développements proches de la saturation sonore.

De son côté, les interventions d’Olivia Block se positionnent donc dans un registre quasi-électroacoustique, avec des fragmentations, bribes et petites poussées sonores. Ces dernières entrent alors en résonance avec les onomatopées que peut livrer Bertucci, qu’on croirait, en pareille hypothèse, agir via son saxophone détimbré. Parfois un peu dérangeant à l’écoute, le résultat témoigne néanmoins d’une belle collaboration, entre deux musiciennes intéressantes et qui, effectivement, avaient tout pour se rencontrer.

François Bousquet
le 07/05/2025