du 21/02/2025 au 11/05/2025
Palais de Tokyo,
Paris
Avec son titre programmatique, l’exposition collective de cette nouvelle saison du Palais de Tokyo, proposée par Amandine Nana, assume une dimension festive et délibérément tournée vers les rassemblements sociaux dédiés à célébrer quelque chose. Sont ainsi mis de côté toute autre forme de manifestation ou de réunion humaine, au risque de gommer un peu les aspects politiques et revendicatifs que véhiculent bien souvent ces modes d’expression. En vérité, plutôt que des messages ou des objets ouvertement politiques, les moments collectifs ainsi documentés se revêtent d’une portée symbolique par leur existence même.
Ainsi se trouvent représentées plusieurs parades ou manifestations issues des coutumes et traditions afro-étatsunienne (par Attandi Trawalley ou Lorraine O’Grady) ou panafricaines (chez Marilyn Nance). Les différentes marches ou carnavals, avec leurs couleurs et leurs tenues (évoqués par Alberto Pitta) se trouve relayés par la présence de beaucoup de sons dans l’espace d’exposition : bruits des rues d’Accra captés par Caleb Kwarteng Prah, musiques ou chants. C’est la vie même qui se trouve retranscrite dans la grande courbe du Palais de Tokyo, avec son espace généreux qui permet également de s’appréhender, en tant que visiteur, comme partie d’un corps social.
En résonance, plusieurs installations « immersives » (ou, a minima un peu réalistes) parsèment le parcours : le taxi ghanéen de Caleb Kwarteng Prah à une échelle quasi-1, la Place de la République reproduite par Pris Roos avec quelques panneaux, un cageot en plastique et un jeu d’échecs… Des œuvres participatives invitent également le public à contribuer très concrètement : petit podium, mur d’écriture et de dessin, baby-foot de Bocar Niang avec des figures historiques (James Baldwin, Frantz Fanon, Rosa Parks) à la place des joueurs, questionnaire avec QR Code, grand espace de jeu proposé par le Resolve Collective en haut des escaliers au fond de la courbe.
Sur le plan formel, on releva aussi la présence de plusieurs œuvres textiles, chez Maty Blayenda, Moki Cherry, Alberto Pitta ou Attandi Trawalley. Là encore, l’inspiration folklorique ou ancestrale est intentionnelle, bien loin de toute modernité technologique ou numérique. Souvent rudimentaires, les œuvres exposées peuvent, par exemple, se constituer d’une simple présence dans un arbre (le Tree Dance de Gordon Matta-Clark, situé dans un parc sur le campus de Vassar College, capté par une vidéo), ou d’un grand hiéroglyphe de Lauren Halsey, sculpture retraçant la gentrification du quartier South Central de Los Angeles à la manière de l’Égypte antique.
En fin de parcours, et afin de reboucler avec l’aspect revendicateur, Mona Varichon filme un « chant pour Assa », donné à l’occasion d’une rencontre avec l’activiste Assa Traoré, dans le cadre de son combat autour de la dénonciation des violences policières ; façon de rappeler que, si on manifeste, c’est qu’on est bien souvent une minorité opprimée.
le 06/05/2025