Sinemis

Avec Farewell, voici quelques nouvelles de la scène électronique turque, peu présente sur ces pages (hormis Ekin Fil, dans un registre ambient, dont on chronique presque toutes les sorties). Fondatrice du label Injazero Records, Sine Buyuka mène, en parallèle, une carrière musicale en tant que Sinemis et publie, avec ce disque, son premier long-format (après un mini-album sorti en 2022) sur sa propre structure. Inspiré par le tremblement de terre qui a frappé son pays cette même année 2022, cet album d’une grosse demi-heure se déploie entre electronica et techno, avec des rythmiques et textures cadencées qui traduisent une certaine forme d’urgence (celle de quitter son domicile pour échapper au phénomène naturel ?).

La fréquence de ses pulsations crée alors un sentiment quasi-anxiogène (Unsee) mais produit aussi une impression presqu’euphorisante, l’auditeur se trouvant emporté par cette combinaison entre coups plutôt sourds et nappes opaques, ou bien entre ces dernières et des montées de synthé. En sus, cette conjonction peut aussi laisser apparaître quelques appétences mélodiques (How To Lose A Country ou le morceau-titre) tandis qu’à d’autres moments, c’est une véritable ligne chromatique que Sinemis propose (Dua II ou le réussi Us vs. Them).

Sous-tendu par un contenu politique (des intitulés comme How To Lose A Country et Exit Democracy laissent peu de doute à leurs finalités et aux positions de Sine Buyuka à l’égard du régime d’Erdoğan), Farewell aurait certainement mérité un ou deux morceaux supplémentaires, tant le parcours qu’il propose s’avère convaincant.

François Bousquet
le 06/06/2025