01/06/2025
Maison de la Radio,
Paris
En clôture d’un week-end « Akousma » dont nous n’aurons assisté qu’à cette ultime soirée (et ultime date de cette saison de Multiphonies du GRM), tout le monde se produisit depuis la console, format qui éveille toujours une certaine réserve chez nous, mais qui permet de se concentrer sur la manière dont les artistes se saisissent de l’acousmonium, disposé en majesté sur la scène du studio 104. Pour ce dimanche, deux pièces de répertoire et trois prestations live étaient proposées, pour des séquences d’une vingtaine de minutes chacune.
Luménitudes d’Ivo Malec, pièce de 1968 diffusée par Nicolas Debade, opéra dans ce registre électroacoustique, classique mais efficace, mêlant frottements, bruissements et froissements. Plus tard, Presque Rien N°2 de Luc Ferrari, morceau de 1977 diffusé par Emmanuel Richier, apparut comme précurseur de travaux de field recordings beaucoup plus répandus cinquante ans après. À preuve, sur ce titre et sur un tapis de cordes, les oiseaux pépient, les cloches d’église sonnent, la forêt bruisse, la chouette hulule, l’orage éclate et la pluie tombe. Ferrari y dit aussi quelques phrases et donne des à-coups métallico-industriels plutôt bien assortis aux captations précitées.
Entre ces deux pièces, Jules Négrier, chargé de la programmation du GRM (on n’est jamais mieux servi…), s’installa à la console pour An Iris Crackled Like Eyelids, intéressant morceau combinant nappes, couinements et grincements. Progressivement densifié, son titre accueillit aussi quelques accords plus mélancoliques, avant une dernière partie plus chargée et plus riche. En habitué de l’acousmonium, le Français déploya une bonne spatialisation du son tout au long de ce gros quart d’heure.
Après l’entracte, place à Pali Meursault pour un morceau débuté par des larsens et cliquetis augmentés, et qui ambitionnait de retracer la chaîne de production d’un micro, à partir d’enregistrements saisis dans une usine au Danemark. De fait, des paroles échangées entre ouvriers, traduites en anglais par une voix apparemment issue d’une IA, jouxtaient des tapotements, bruits de pistons et poussées mécaniques. Parfait exemple du mélange entre industrie et électronique, à la fois dans ses intentions et son résultat, Microphone 1 avait toute sa place dans un tel plateau.
Pour terminer celui-ci, la tonalité fut plus profonde, voire mystique, puisque Maria W Horn (qui avait constitué notre principale motivation de déplacement, suivant les travaux de la Suédoise sur Hallow Ground ou comme co-gérante du label XKatedral) donna une pièce fondée sur l’orgue d’une église suisse. Si le rendu acoustique de All Solids Melt Into Aether fut, à l’évidence, différent de celui du lieu sacré, le travail sur le souffle en entrée de notes s’entendait très bien, donnant l’impression de se trouver face aux tuyaux d’orgue. Les sons de la musicienne se trouvaient graduellement dotés d’une forme de granulosité presque distordue, habile contrepoint des appuis un peu solennels de l’orgue. Soulignés par un éclairage centré sur les huit haut-parleurs sphériques rouges de l’acousmonium, ces sons emplirent aisément l’espace.
le 10/06/2025