24/01/2007
Instants Chavirés,
Montreuil
Jack Rose joue assis, sa guitare sur les genoux. Il honore sa réputation de virtuose : ses deux mains semblent courir sur les cordes, esquissant un ballet finement chorégraphié. Ses morceaux sont formés sur une base d’arpèges produits en fingerpicking, auxquels ils ajoutent des variations. Sur le premier morceau, ce sont des glissés de la main gauche, à mi-chemin entre la slide guitare et le bottle-neck du blues. Tout cet éventail de sons, de techniques, n’est pas sans rappeler John Fahey, et on aimerait que cette référence soit moins évidente. En même temps, on ne risque plus de voir Fahey en concert, alors pourquoi pas un remplaçant ? C’est finement exécuté, mais pas très excitant. Au quatrième morceau cependant, Rose regagne notre attention et détrompe nos pronostics de concert couru d’avance : la guitare devient stridulente, dronesque, à se demander si on n’est pas déjà passé au musicien suivant. Il repassera par la case fingerpicking, mais il aura eu le mérite de nous emmener là où on n’espérait pas.
Vu le fatras qui règne devant lui, il est assez difficile d’identifier tous les instruments dont se sert Campbell Kneale (alias Birchville Cat Motel) : un synthétiseur, des effets, peut-être des sources de musique enregistrée. Avec un micro dans la bouche qui capture ses borborygmes et ses mains qui triturent les potentiomètres de ses appareils, il a l’air d’une créature hybride, un amalgame de viande et de technologie qu’on s’attendrait plus à rencontrer dans un roman de science-fiction. Le set commence de manière intrigante, puisqu’une fois les différents éléments mis en place, c’est de la space-pop qui nous rappelle les années 90, Stereolab et Crescent. Cette longue nappe modulée est extrêmement entrainante et nous rassure sur le concert de ce soir : nous n’aurons pas droit à un drone uniforme, mais au versant plus rock de son travail, celui présenté sur son disque Our Love Will Destroy The World. Puis le son se durcit, la rythmique devient plus présente, au fur et à mesure qu’il pousse à leur paroxysme les effets appliqués. On se demande jusqu’où cela pourra aller, le son semble s’exténuer, il finit par s’effondrer pour laisser la place à une petite mélodie d’ambiance hawaïenne qui rétrospectivement renforce l’impression de tension dégagée par ce concert.
le 29/01/2007